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ÉDITO

Alain Daniélou réalisant une aquarelle (1988)Alain Daniélou réalisant une aquarelle (1988).

Nous dansons, ou plutôt nous guerroyons sur un volcan sans prendre en compte les vrais et graves problèmes qui nous menacent et surtout sans réagir au triste état de notre planète. Le Kali Yuga est pourtant une réalité présente dont Alain Daniélou a souvent parlé en particulier dans son livre « La Fantaisie des Dieux et l’Aventure Humaine, Destin du Monde dans la tradition shivaïte » qu’on pourrait intituler « Apocalypse Now » si le titre n’était déjà pris.

Cette année, je place en première position dans les préoccupations du Centre Daniélou les problèmes de pollution et de surconsommation. Je demande donc à nouveau aux personnes qui reçoivent cette lettre par courrier postal de nous fournir l’adresse email d’un voisin, d’une connaissance, ou de la consulter sur notre site afin d’éviter d’avoir à imprimer ce document éphémère qui n’a pas nécessité d’avoir un support fixe. C’est une petite goutte d’eau face à l’immensité des problèmes écologiques mais c’est un signe et il n’est pas le seul dans les dispositions que nous prenons chaque jour.
Cette lettre d’info est de plus en plus demandée et montre l’intérêt constant que suscite l’oeuvre d’Alain Daniélou dans tous les domaines auxquels il s’est intéressé.
Nous commençons dès à présent à préparer les évènements et à envisager de nouvelles publications et des rééditions pour 2007, année de la commémoration du centième anniversaire de la naissance d’Alain Daniélou.
En cette date précise du Solstice d’hiver, aujourd’hui 21 Décembre à 19h35, toute l’équipe du Labyrinthe se joint à moi pour vous souhaiter de bonnes fêtes et que le cycle du semestre ascendant (pour l’hémisphère nord) ou descendant (pour l’hémisphère sud) vous soit une période heureuse, sereine, harmonieuse.

Jacques E. Cloarec, Le labyrinthe, jour du Solstice d’hiver 2005.

ACTUALITÉS

L’HISTOIRE DE L’INDE

L'HISTOIRE DE L'INDEL’édition club du titre d’Alain Daniélou intitulé « Histoire de l’Inde » paraîtra dans la revue « Club Histoire  » (du GLM, Grand Livre du Mois) du mois de février 2006.

 

EXPOSITIONS

L’exposition « Alain Daniélou sur les routes de l’Inde» qui a débuté le 05 Octobre 2005 se poursuit jusqu’au 04 Février 2006 à La Maison des Indes sous la direction de M. Gaël de Graverol. Commissaire : Simon Hamelin, Tirage photos Claude Matthieu.

Alain Daniélou sur les routes de l’IndeEn 1936, Alain Daniélou entame un long tour du monde dont l’étape ultime est l’Inde. En compagnie de son ami photographe Raymond Burnier, il arpente les routes du sous-continent à la recherche « d’un monde de l’autre côté du miroir », loin des grandes vérités fréquemment véhiculées sur le sujet. Marqué par cette première expérience sensorielle et intellectuelle de l’Inde, Daniélou ne cessera dès lors de retourner dans le sous-continent, parcourant ses lieux saints, fréquentant souvent ses penseurs, maîtres spirituels et artistes, photographiant beaucoup et rédigeant surtout. Son regard se fait tantôt sans complaisance, tantôt plein de respect et de fascination sur les êtres, les monuments et les paysages qu’il découvre.
Le tableau de l’Inde traditionnelle présenté dans cette exposition réunissant quelques uns des plus beaux clichés réalisés par les deux compagnons de voyage se veut un véritable « éloge du divers ». À travers leurs photographies, Daniélou et Burnier se font l’oeil des dieux, peut-être, mais surtout un oeil qui voit, mais aussi qui sent, et qui écoute.

PRESSE
1- Univers des arts : Novembre 2005
Alain Daniélou sur les routes de l’Inde, photographies noir et blanc d’Alain Daniélou et Raymond Burnier. Avec de magnifiques clichés, Daniélou et Burnier nous présentent un tableau de l’Inde traditionnelle.

2-Souvenirs des Indes :
En 1936, deux photographes en quête d’aventures, Alain Daniélou et Raymond Burnier, entament un long tour du monde. Ils tombent bientôt sous le charme de l’Inde, de ses traditions, et sont fascinés par les êtres et les paysages qu’ils croisent, qu’ils vont sans cesse photographier durant des mois. Une vingtaine de clichés en noir et blanc de cette ultime étape de leur voyage sont exposés à la maison des Indes(VI è). Des monuments, des bateaux chargés de marchandises qui remontent le Gange, des fêtes celle du printemps ou Fête des humbles. Ce jour-là, le serviteur a le droit d’abreuver son maître d’injures et chacun joue à s’asperger de teintures liquides. Autant d’instantanés de vie à admirer, en buvant un thé aux clous de girofle offert gracieusement. Leurs photos présentent un pays emprunt de religion, de rites, et de coutumes, avec un sens de l’esthétique qui font oublier pour un moment la pauvreté du pays.

Flavie Novelli, Le Parisien Supplément, 19 oct 2005

Concert Amelia Cuni
Amelia Cuni is a dhrupad singer living in Berlin and teaching Indian singing at the Vicenza Conservatorium. She’s presently working on a New Music production: the 18 microtonal ragas by John Cage (see description below) produced and premiere by Maerzmusik in Berlin. Cage does not give any texts for his ‘ragas’ in the SONG BOOKS but only graphical notations of microtonal series among which the performer has to choose and build up ragas. For some ragas, She has written texts herself while others uses vocalizations or Indian songs fragments. Since Cage has often used other authors’ writings also in a self-referential manner, she will use a few phrases from some of Danielou’s writings (in various languages) describing Indian music principles.

JOHN CAGE
18 MICROTONAL RAGAS:
SOLO 58 from SONG BOOKS (1970)

realized and interpreted by dhrupad singer AMELIA CUNI
produced by MAERZMUSIK, Berlin 2006
Premiered on March19th, 2006 at MAERZMUSIK / BERLINER FESTSPIELE (www.maerzmusik.de)

Performers:
Amelia Cuni: dhrupad vocals
Ray Kaczynski: percussion
Federico Sanesi: percussion
Werner Durand: drones/electronics

ZOOM SUR

Revue de presse

ARTICLE DE PRESSE PARU DANS « ELEMENTS POUR LA CIVILISATION EUROPEENNE ».
AUTOMNE 2005
POUR L’OUVRAGE SHIVAÏSME ET TRADITION PRIMORDIALE.

Alain Daniélou le noble voyageur

Loin d’être seulement un historien des religions, spécialiste de l’hindouisme, Alain Daniélou fut ce que les romantiques allemands, et avant eux, les fidèles d’amour, nommaient un « noble voyageur ». L’Inde traditionnelle fut, pour lui, une partie spirituelle. Au-delà de l’analyse et de l’explication, en l’occurrence particulièrement bien étayées par une érudition du meilleur aloi, son cheminement témoigne d’une implication, en particulier dans le domaine de la musique. Ainsi le musicologue fut également musicien, de même que le savant exégète des mythologies sut rejoindre, dans son savoir, une expérience intérieure. Ainsi que l’écrit Jean-Louis Gabin, dans sa préface à Shivaïsme et tradition primordiale, « une telle adhésion à l’objet de sa recherche n’a presque jamais cours dans la démarche universitaire, férue de distance critique. On appréhende mieux une telle adhésion dans le domaine artistique si l’on songe à Gaugin dans l’univers métaphysique tahitien que la colonisation et les missions de son temps s’occupaient à détruire. La démarche de Daniélou s’apparente ainsi avant tout à la quête traditionnelle qui vise à l’identification du chercheur avec l’objet de sa recherche, ou, si l’on préfère, de l’initié avec la connaissance ». Segalen, dans ses Immémoriaux, Louis Massignon, dans sa Passion d’Al-Hallâj, offrent d’autres exemples de cette herméneutique créatrice, de cette alliance, particulièrement heureuse, et rare, entre la rigueur scientifique et l’exactitude poétique.
Qu’en est-il des « structures subtiles de l’être humain » ? Quelles sont les modalités de l’Un et du multiple ? Quelles sont les relations profondes entre l’apparent et le réel ? Le polythéisme, en fait, n’exclut nullement la médiation sur l’Un ou, plus exactement, sur la « non-dualité »- la métaphysique de l’Un étant toujours menacée par ce que Henry Corbin nommait l’ « idolâtrie métaphysique de l’Un », elle-même dualiste en ce qu’elle oppose l’Un et le multiple. Or, « ce qui reste lorsque l’esprit relise que le concept d’être vivant et celui d’âtre divin sont de pures illusions et que les apparences perceptibles n’ont point de réalité, est appelé l’immense-non-duelle » (Advaya- Târaka Upanishad).

Les divers textes réunis dans ce recueil, « Cosmogonie shivaïte et polythéisme », « Le symbolisme du Linga », « Musique, hommes et dieux », « La nature de la beauté », entre autres, répondent à ces questions en en posant d’autres, qui concernent directement l’origine de notre pensée et de nos civilisations. Nous apprenons ainsi que la métaphysique relève moins du dogme, de la scolastique figée, que la musique. « La musique a sept lettres, l’écriture a vingt-cinq notes », écrivait Joseph Joubert, en invitant la pensée à d’infinies variations et comme en « répons » au Vishnu Purdna : « C’est par un mouvement de l’air, en soi-même non différencié, que les différentes notes sont produites au moyen des divers trous de la flûte. De même, c’est à partir d’un Soi suprême et non différencié que les divers états d’être semblent exister. » L’oeuvre d’Alain Daniélou nous offre ainsi une vision panoramique du destin de ces dieux qui dansent, aiment et guerroient dans un désordre apparent, mais dont chacun, cependant, « préside au fonctionnement d’un aspect de l’Univers ».

L.O.A

DANSE

Les danses exotiques en France 1880-1940
Par Anne Decoret Ahiha.

Extraits
Alain Dunoéli : page 241

1907, Neuilly-sur-Seine-1994, Suisse

Dunoéli était le nom de scène d’Alain Daniélou. Il est d’abord peintre, pianiste, étudie le chant et la danse classique auprès de Nicolas Legat. Avec le photographe Raymond Burnier, il effectue en 1932 un voyage dans le Pamir afghan, en Afrique du Nord puis en Asie du Sud-Est. Il donne plusieurs récitals en 1933-1934. Son répertoire comprend également : Deux préludes (Chopin), El Albaïcin (Albeniz), Danses des ombres (Gluck), Danse révolutionnaire (Debussy), Danse du feu (Falla). Il part en Inde en 1935 et devient l’un des grands spécialistes de la civilisation hindoue.

Extrait page 262 :
« En se tournant vers les danses d’ailleurs, les danseurs occidentaux interrogeaient la nature même du mouvement dansé, sa forme autant que sa signification. Ces danses leur révélaient, du moins le pensaient-ils, la source originelle du mouvement qui, selon l’imaginaire primitivisme, était encore connue des peuples exotiques. « Ce n’est pas tant par une curiosité d’esthète ou de théoricien qu’est poussé Alain Dunoéli quand il s’embarque pour observer les danses primitives, affirme ainsi le poète Robert Honnert. Il part à la recherche des sèves éternelles. (…) La technique est utile, mais un bon grammairien n’est pas un bon écrivain. Le technicien de la danse n’est pas le danseur. (…) Il faut retrouver le jaillissement, le tuf humain. La danse était faite pour donner aux hommes le spectacle de leurs inquiétudes ou de leurs joies profondes ; elle était faite pour représenter de la vie à des vivants ; et c’est ce secret que demande Alain Dunoéli à ces danseurs des temps lointains, qui réunissaient si étroitement spectateurs et acteurs. »

EN LIBRAIRIE

Rabindranath Tagore – Poèmes chantés.
Présentés, traduits et adaptés par Alain Daniélou, Préface de Georgette David, Editions Michel de Maule, Paris, Janvier 2005.

Rabindranath Tagore – Poèmes chantésRabindranath Tagore disait souvent que ses chansons survivraient au Bengale longtemps après que son nom et ses écrits seraient oubliés. Il est difficile de croire que l’oeuvre littéraire du grand poète bengali pourrait l’être un jour. Car si ses livres sont considérés comme des  » classiques « , c’est-à-dire comme appartenant au passé, ses mélodies, chantées par tous dans toutes les régions du Bengale, restent d’une actualité toujours présente. Au cours du XIXe siècle, la musique classique indienne avait développé au Bengale des techniques extrêmement raffinées qui nécessitaient des exécutants très spécialisés et des audiences d’amateurs éclairés. Tagore inventa un nouveau langage musical qui, tout en conservant les traits essentiels de la musique savante de l’Inde, sut mettre son rare pouvoir d’expression à la portée de tous. Tagore était toujours profondément ému par le spectacle de la vie ; ses chansons, par leurs mélodies simples et vigoureuses, ont donné une voix, une expression aux sentiments de millions de femmes et d’hommes de sa patrie. On entend encore ces chants partout : dans les riches maisons des villes, dans les rizières isolées, sur les rivières ou dans les cabanes de pêcheurs, dans les ruelles des villages comme dans les amphithéâtres des universités. Leur vibrant message ne connaît pas les différences de religion, de race, de caste ou d’âge. En quelques années, la musique de Tagore a conquis tout le Bengale et rythme de ses chants la vie quotidienne. Aujourd’hui, l’Inde hindoue et le Bangla Desh musulman ont chacun choisi une mélodie Tagore comme hymne national.

EXTRAITS

Catalogue de l’oeuvre d’Alain Daniélou
Par Anne Prunet et Marie-Laure Bruker.

LE TOUR DU MONDE EN 1936
Éditions Flammarion, 1987.

« – Pour le tour du monde, c’est combien ? » question banale qui, accolée à la perspective d’entreprendre un voyage aussi improbable plonge plus d’un lecteur dans un monde de pure fiction.

LE TOUR DU MONDE EN 1936 - Éditions Flammarion, 1987Pourtant, c’est bien un récit de son tour du monde en 1936 que nous conte Alain Daniélou, d’une écriture efficace et simple qui illustre l’esprit des deux voyageurs. Libres comme l’air, de leurs actes et de leurs pensées, les deux jeunes gens, Alain Daniélou et Raymond Burnier, traversent tour à tour les Etat-Unis, le Japon, la Chine et l’Inde avant de prendre le chemin du retour pour l’Europe.
Daniélou porte un regard tantôt sans complaisance, tantôt plein de respect et de fascination sur les êtres, les monuments, le paysage qu’il découvre. Ce tour du monde est un véritable « éloge du divers », garant de l’expression de la richesse des savoirs de tous les peuples, qui n’ont d’égalité que dans la beauté. À ce titre, Daniélou se fera le défenseur des peuples colonisés, dont les plus puissants économiquement oppriment la langue et la culture. Ceci le conduit à brosser un tableau au vitriol des USA, comme des touristes ou colons européens en Asie.
L’attitude désinvolte et aristocratique des deux hommes leur fait prendre des points de vue parfois dédaigneux pour la masse, de quelque origine qu’elle soit, mais jamais injurieuse ni déplacée envers les habitants des pays qu’ils traversent. La profonde admiration dont Daniélou fait preuve pour l’Orient préfigure son installation future en Inde, où il passera plus de vingt ans. Sans parler de dimension prophétique, ce récit, écrit dans cette période trouble d’entre deux guerres, alors que la France dans sa quasi-totalité était favorable au maintien de ses colonies, met l’accent sur les faiblesses et les dysfonctionnements néfastes de l’Occident chrétien.
Avide de rencontres, de découvertes et de beauté, Daniélou ne rentrera en Europe que pour désirer poursuivre ses pérégrinations orientales :
Au fond, pour les étrangers que nous sommes devenus, cette vie occidentale semble hostile et superficielle ; et, quand le soleil se lève embrumé sur la verte forêt des avenues désertes, nous sentons un obscur désir de choses lointaines : quand repartons-nous ?
Le Tour du monde en 1936 d’Alain Daniélou s’apparente à un journal de voyage débridé, où un art certain de la caricature se mêle à beaucoup d’intuition.

Le Monde, octobre 1987.

CLIN D’OEIL

Du Bulletin N° 11 (Automne 2005) de la Société des Amis de Gabriel Matzneff :
Gabriel Matzneff a remis en septembre à la Table Ronde le manuscrit de son prochain roman, Voici venir le Fiançé, qui sortira en librairie au premier trimestre 2006, sans doute début mars. Gabriel Matzneff a commencé d’écrire Voici venir le Fiançé à Naples en mai et juin 2004. Il a repris son travail l’hiver suivant à Marrakech, puis le printemps et l’été 2005 à Venise et à Zagarolo.

KAMAL SINGH

KAMAL SINGHKamal Singh et son frère Gulab furent les assistants de Daniélou et de Burnier durant leur séjour à Bénarès de 1937 à 1952.

 

 

 

Giano (Janus, gardien des portes), berger des Abruzzes, est le dernier arrivant au labyrinthe après Minos, Arianne, Sarpedon, Thésée, Thalos, Perseo, Pirithoos.

GALERIE

Aquarelle par Alain Daniélou : Pêcheurs de couteaux, Punta Sabbioni, Venise, Juillet 1972.Aquarelle par Alain Daniélou :
Pêcheurs de couteaux, Punta
Sabbioni, Venise, Juillet 1972.

THÈSE

Extraits de la thèse de Samuel Berthet, La culture française en Inde de 1870 à 1962: présences et actions. Dynamiques indiennes et politique française. À paraître en 2006 aux éditions de l’Institut français de Pondichéry et du Centre de Sciences Humaines (New Delhi).

Santiniketan, Daniélou et Bossennec :
De 1935 à 1940, c’est le professeur Christine Bossennec, de Sainte Marie de Neuilly ancienne préceptrice d’Alain Daniélou et de Zaher Shah, qui prend en charge les cours de français. À Santiniketan, elle occupe bientôt le poste de directrice de la section féminine Alain Daniélou, ami du poète, qui séjourne à de nombreuses reprises à Santiniketan entre 1932 et 1945, rappelle dans ses mémoires le rôle fondateur de l’école du poète pour l’histoire de l’Inde :
« Santiniketan était le seul lieu en Inde où des Européens pouvaient rencontrer des Indiens sur un plan d’égalité, dans une atmosphère indienne, même si cette atmosphère n’était pas traditionnelle car le poète appartenait au brahmo samaj, secte réformiste (…) et refusait tous les interdits qui rendaient les contacts avec les hindous difficiles. Nombreux étaient les visiteurs : poètes écrivains, artistes, philosophes et savants. Les plus célèbres professeurs d’Oxford ont fait des séjours à Santiniketan. C’est de cette pépinière que sont sorties beaucoup de personnalités qui ont joué un rôle clé dans l’Inde indépendante, y compris Indira Gandhi (…). »
Une visite très importante s’est produite entre-temps, à la fin de l’année 1932, c’est celle de deux jeunes voyageurs de retour d’un voyage d’exploration en Afghanistan. Il s’agit de Raymond Burnier, un photographe suisse, et d’Alain Daniélou, un artiste doublé d’un chercheur au génie protéiforme, originaire de Bretagne. Ce dernier mène de front pratique chorégraphique et recherche musicologique, notamment aux côtés du compositeur Max d’Ollone et de l’ingénieur Maurice Martenot. La première visite des deux jeunes explorateurs marque le début d’une longue série de séjours et d’une collaboration suivie avec le poète et son institution.
Les deux hommes forment tout d’abord avec Tagore le projet de créer en Europe un réseau d’écoles soeurs de Santiniketan. Puis, dans le but de récolter des fonds auprès de ses amis, le poète les charge de créer une association qui prendra le nom d’Association des Amis de Tagore, citée précédemment.
Par le biais de ses activités artistiques, et particulièrement musicales, Alain Daniélou commence une longue coopération avec Sangit Bhavan, le département de musique de l’université chargé de la diffusion des chansons du poète très populaire au Bengale, mais également dans toute l’Inde, et traduites dans de nombreuses langues.

Ces chansons constituent une partie importante de l’oeuvre de l’artiste, puisqu’on considère qu’il en a composées plus de deux mille. Max d’Ollone, lui-même, va composer une pièce musicale s’intitulant Deux poésies, à partir d’écrits du poète, en 1935.
Tagore confie la responsabilité de ce département au jeune breton, avant que d’autres projets ne mènent les deux compagnons à Bénarès en 1938. La collaboration avec Santiniketan ne s’arrête pas pour autant. Daniélou publie jusqu’en 1949 des articles dans la revue de l’université, où il se rend encore à plusieurs reprises. Il va également traduire et orchestrer des chansons du poète.

Calcutta :
Toujours au chapitre des visites, celles nombreuses que réalisent Daniélou et Burnier à partir de 1932 peuvent être signalées. Ces derniers se trouvent tout de suite des affinités avec les élites de la ville. Avant leur première visite en Inde, Daniélou a fait connaissance en France avec le danseur bengali Uday Sankar et son imprésario Haren Gosh, une des grandes personnalités du monde du spectacle en Inde. Lors de leur première visite à Calcutta, ils retrouvent ce dernier, puis sont rapidement intégrés au cercle des Tagore. Au fur et à mesure de leurs différents séjours, ils prennent part à l’activité culturelle et intellectuelle du pays, dans le cadre de la renaissance des arts indiens. En 1935, lors d’un tour du monde, ils importent, dans un but exploratoire, une des premières roulottes jamais vues dans la péninsule.Fruit de ces explorations, Alain Daniélou va publier plusieurs articles sur l’iconographie, l’architecture des temples, la sculpture etc., dans la revue de l’Indian Society of Oriental Art, publiée à Calcutta. Raymond Burnier contribue à ces travaux par ses photographies, ainsi qu’à ceux d’autres éminents spécialistes comme Alice Boner ou Stella Kramrish.

L’Inde après l’Indépendance :
Du côté de l’élite bengalie, le sentiment est celui d’avoir trouvé un interlocuteur capable de partager et d’apprécier ses valeurs culturelles, un interlocuteur dont elle se sentait frustrée jusque-là. Les personnalités de Bossennec, Journot et Daniélou entraînent dans leur sillage les jeunes agents de la représentations française. Ces derniers, souvent en train de faire leurs premières armes, bénéficient de leur compétence, de leur expérience et surtout de leur connaissance.
Concernant Daniélou, bien qu’établi à Bénarès, il reste en contact avec Calcutta et Santiniketan. Il fait désormais autorité dans le domaine de la musique classique indienne. À l’université de Bénarès, il occupe le poste de directeur adjoint du département de musique, un département qu’il a créé aux côtés du grand musicien Omakarnath Thakur.

En 1947, Ratindranath Tagore, le fils du poète lui confie l’orchestration de l’hymne national Jana Gana Mana, une composition de son père, et du chant national Bandé Mataram, de B.C. Chatterjee et mis en musique par son père. Daniélou la réalise en France avec l’aide du compositeur Max d’Ollonne. Il participe également parfois à l’animation des soirées réunissant Bengalis et Français en donnant des récitals vocaux. En 1950, à Calcutta, il est nommé président de l’All Music Conférence qui réunit chaque année les plus grands musiciens de l’Inde.

Le Fleuve de Jean Renoir :
Au début 1949, pour les repérages, et de la fin 1949 à mai 1950, le tournage du film de Renoir donne lieu à de nombreuses rencontres. L’aide de Bossennec pour rassembler l’équipe de tournage, organiser des rencontres entre le cinéaste et la population, va se révéler une fois de plus très précieuse. Alain Daniélou collabore à la partie artistique du projet, et organise la rencontre entre le cinéaste et la danseuse Radha, fille du président de la société de Théosophie. Dans ses mémoires le cinéaste rappelle ces événements :
« C’est à Bénarès, la ville sainte que nous fîmes connaissance de la danseuse Radha. Nous avions rencontré son futur mari, Raymond Burnier, chez l’attaché culturel français à Calcutta, Christine Bossennec, qui m’avait demandé de faire une conférence aux élèves de l’école. Il nous invita à passer les fêtes de Noël dans le palais qu’il habitait à Bénarès (…). C’est chez lui que je rencontrai Alain Daniélou, le musicologue qui connaît si bien l’Inde. Radha me fit connaître les danses dites “katakali”. »

L’Institut français de Pondichéry :
En visite à Pondichéry au cours du mois de juin 1957, Ostrorog, ambassadeur de France, écrit :
« Les résultats obtenus par le Professeur Filliozat, M. Daniélou et M. Legris montrent ce qui peut s’accomplir lorsque des hommes de qualité sont en place. La voie est ouverte : à nous d’agir en sorte qu’elle se poursuive et s’élargisse sans se perdre dans les sables des disputes de clocher. »

Adyar, Société de Théosophie :
En 1953, Daniélou quitte le département de Musique de l’université de Bénarès et prend la direction de la bibliothèque de la Société de Théosophie à Adyar, près de Madras. Il en modernise les techniques de conservation, tout en remettant à l’honneur les travaux des indianistes français. Parallèlement, il poursuit son oeuvre de préservation de manuscrits anciens, particulièrement dans le domaine de la musicologie.

Santiniketan (suite) :
En Inde, à Santiniketan, des Français participent à l’oeuvre éducative et culturelle du prix Nobel bengali. Des vocations naissent chez les élèves indiens dans ce centre novateur de rencontre des cultures. D’autres se forgent également du côté français. Les parcours d’Andrée Karpelès, d’Alain Daniélou ou de Christine Bossennec en sont l’illustration.

Conclusion :
Si depuis Loti, l’idée s’est imposée parmi les cercles des Français s’intéressant à l’Inde que : « Le génie de la France est celui qui saura le mieux s’associer à celui de l’Inde », elle n’a guère dépassé ces cercles-là. De même la France a peu fait la promotion en Inde de ses ressortissants qui ont contribué à la reconnaissance du « génie indien », indianistes ou passeurs d’Inde. Là où l’Allemagne a su imposer un Max Muller comme une référence majeure et incontournable, voire comme la meilleure incarnation du dialogue Orient-Occident, qu’en est-il de la mémoire d’un précurseur, savant, aventurier et ardent promoteur de l’Inde tel qu’Anquetil Dupperon ? Parmi les indianistes, les noms de Burnouf, et surtout de Lévi pourraient tout aussi bien être cités. Parmi les passeurs d’Inde, la mémoire de Malraux, ou celle de Daniélou, pourrait certainement être cultivée pour le plus grand bénéfice des relations entre les deux pays, de même que celle d’une dame aussi connue des élites bengalies qu’inconnue en France, Bossennec.