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Lettre ouverte à Monsieur Etienne Gernelle, directeur de la rédaction de l’hebdomadaire Le Point : au sujet d’un article intitulé « L’Affaire Daniélou » paru dans Le Point.

Monsieur le Directeur de la Rédaction,

L’article en question est agressif à l’égard d’un auteur mort il y a 16 ans et dont l’oeuvre s’étale sur 45 ans, a été traduite en 11 langues, distribuées dans 18 pays. Mais nous n’avons rien contre une critique informée. Un minimum de recherche et de connaissance de cette oeuvre semble cependant le moins qui peut être requis pour ne pas transmettre des informations erronées. Nous apportons ci-après des éléments qui prouvent cette absence de recherche. N’est-ce point cet article qui « trahit » ses buts ?
Premier problème dans le titre même : employer le nom « Daniélou » sans en donner le prénom c’est jouer de manière indécente en essayant d’associer les deux frères. Non seulement mais citer la mort du cardinal dans un article qui est supposé traiter d’hindouisme relève d’une conception journalistique peu digne. Qu’a à voir cette mort avec le sujet traité !
Deuxième point : la légende de la photographie : « Alain Daniélou jouant du Sitar » correspond à écrire que Rostropovitch jouait de la guitare. Mais on le sait, l’Inde c’est bien loin, petite nation, petite civilisation ! Troisième point : dans cette légende « le Maître accusé » comme dans le sous-titre parlant « d’un dernier disciple » puis « l’élève qui l’accuse », répété dans le texte, tout cela relève du fantasme et est contredit par tout ce que Daniélou a écrit, dit et répété à savoir qu’il ne se considérait absolument pas comme un gourou, se moquait vertement des Occidentaux en quête de « maître » comme de bons restaurants, était un travailleur solitaire qui n’a jamais eu de disciples et jamais autour de lui une chapelle de dévots ce qui l’aurait profondément agacé. Là aussi les citations sont nombreuses et notre lettre d’information (N° 21) sur le site www.alaindanielou.org en fournit amplement. (Annexe 1). Je relève entre autres : « J’ai eu la chance d’être en contact avec une certaine forme de savoir, et j’ai cherché à l’exprimer. Mais je ne joue pas de rôle, je ne suis pas un gourou. »

Au sujet de Swami Karpatri (Annexe 2) l’article prouve qu’il ignore tout de ce personnage alors qu’un minimum de recherche aurait permis de donner des informations intéressantes. Mais il faut et savoir qu’Internet existe, et Google aussi et parler un minimum d’anglais. Pourquoi chercher dans les textes de Daniélou des éléments qui n’y sont pas, quand, actuellement sur Internet, Google repère plus 5020 sites sous le nom de Karpatri et 326 sous « Karpatri untouchable ».

Sans aller plus loin que la première page de ces 326 sites voici ci-après ce que l’on peut relever dans deux des premiers cités qui semblent sérieux et bien informés: “the most controversial orthodox ascetic of post- Independence India”/one section of Brahmans, led by Swami Karpatri, constructed another Vishvanâtha temple which was to remain ‘pure’(unpolluted by untouchables)/.the R.R.P. manifesto, a « handbook for Indian reactionaries and obscurantists/the anachronistic views of Karpatri, his ingenuous fanaticism,/His rigid conservatism was perhaps most evident in his attitude toward the socially oppressed »(Textes complets en Annexe 3)

Concernant le linga (Annexe 4) les « très catholiques » (Le Point dixit) éditions du Cerf ont publié en 1981 un livre « La présence de Siva » de Stella Kramrisch, indologue réputée (Annexe 5). Elle y écrit un long et savant passage (pages 181 à 289) qui ne laisse aucun doute sur le lien entre le linga et le phallus du dieu, la yoni et le sexe de la déesse. Nous relevons entre autres page 284 « Jamais dans aucun des mythes ou formes du linga de Siva, la base phallique évidente du signe du Grand Dieu ne fut oubliée. » En 2010 les temps ont changé : on a déplacé un monument phallique sur le passage du pape durant son voyage à Malte (Annexe 6)
Daniélou a écrit son premier livre concernant le Yoga en 1949 ; les derniers ont été publiés en 2006. Pendant 56 ans des personnes très éminentes, des spécialistes de l’Inde ont étudié ses textes. Il y a des centaines sinon un millier de critiques, bonnes et mauvaises, dans nos archives. Serait-il possible que tant de gens pendant tant de temps aient pu être bernés par un génial faussaire ? Nous nous joignons aux inconditionnels de Daniélou mais aussi aux personnalités, critiques impartiaux de son oeuvre, qui nous ont manifesté leur étonnement en lisant cet article. Je vous prie, Monsieur le Directeur de la Rédaction, d’accepter l’expression de mes salutations.

Pour le Centre d’Etudes Alain Daniélou, Jacques Cloarec, Fondé de pouvoir.

ANNEXES
ANNEXE 1 : Lettre d’information n° 21 sur notre site Internet www.alaindanielou.org
« Karpatri a bien voulu répondre à nombre de mes questions. Mais je ne cherchais pas un gourou et il ne cherchait pas des disciples. Cette idée de chercher un gourou est tout à fait une maladie des Occidentaux. Tous ces gens qui veulent avoir un maître et devenir eux-mêmes des gourous ! Je ne cherchais pas à avoir un rôle ! J’ai eu la chance d’être en contact avec une certaine forme de savoir, et j’ai cherché à l’exprimer. Mais je ne joue pas de rôle, je ne suis pas un gourou. »

ANNEXE 2 :
Une regrettable confusion entre deux partis de la droite indienne qui prend quelques lignes dans « l’Histoire de l’Inde » (Fayard 1985), est le prétexte à un procès d’intention : Alain Daniélou est accusé d’avoir voulu salir celui pour qui il a toujours exprimé admiration et reconnaissance. Nous nous inscrivons totalement en faux contre cette assertion concernant Karpatri. Daniélou a toujours exprimé sa dévotion à ce penseur tant par ses écrits que dans les nombreux interviews dans lesquels il en parle. Sachant de l’activité politique de Karpatri Daniélou insiste sur le fait que ses rapports avec lui excluaient cet aspect politique et ne concernaient que les aspects philosophiques et religieux de l’hindouisme qui lui ont permis d’écrire un de ses livres les plus connus, traduit en plusieurs langues ; « Mythes et Dieux de l’Inde, le Polythéisme Hindou » dont la première version est parue à l’Université de Princeton. On trouvera toujours dans notre dernière lettre d’information n° 21 des textes de Daniélou qui clarifient ses rapports avec Karpatri. Les buts de notre centre sont de publier tout ce que Daniélou a pu écrire afin que des critiques compétents et honnêtes puissent juger de sa pensée et de son oeuvre. Ainsi nous ne porterons aucun jugement sur Karpatri car ce n’est absolument pas notre rôle. Les accusations professées dans votre article demandent cependant une mise au point. Si Karpatri est considéré comme un saint en particulier pour beaucoup de gens de Bénarès, il a été violemment attaqué pour ses positions orthodoxes extrêmement intransigeantes et ses oppositions aux lois du gouvernement indien dominé par Nehru et le parti du Congrès qui finirent par l’emprisonner. Ceci concernait en particulier son opposition farouche à l’entrée des intouchables dans les temples hindous.

 

ANNEXE 4 :
Alain Daniélou écrivait le 27 Février 1988 au Dott. Gino Del Piero Udine Italie : « …le mot Linga signifie « signe ». C’est par un signe, un linga, que Shiva a marqué les lieux sacrés favorables à la réalisation spirituelle. Ces emblèmes ne sont pas toujours de formes phalliques mais des objets informes tel que le linga de Vishvanath à Bénarès, qui ressemble à un plat de lentilles. » Cependant – comme le fait très fréquemment Daniélou – il est, dans sa représentation courante, assimilé au sexe du dieu Shiva et son socle au sexe de la déesse.
L’interprétation ne date pas d’hier et est connue en Occident depuis fort longtemps. Nicolo Manucci, voyageur italien qui séjourna à la cour des Moghols écrivait déjà dans son livre « La storia do Moghol » en 1698, que « Quest’idolo che è di pietra e si chiama lingon» était la représentation du sexe du dieu. Le grand indianiste Jean Filliozat, qui fut directeur de l’Institut français d’Indologie de Pondichéry écrivait à propos de voir dans le linga le phallus de Shiva : « C’est le point de vue de la plupart des Shivaïtes en Inde contrairement à ce que l’on pense en Occident ».

ANNEXE 5 : La Présence de Siva par Stella Kramrisch, éditions du Cerf 1981
Grand nom de l’indologie internationale. Stella Kramrisch est célèbre pour son ouvrage « The Hindu Temple, 1946, dernière réédition 2002» livre auquel Alain Daniélou et son compagnon, le photographe Raymond Burnier ont beaucoup contribué en particulier pour l’iconographie. Un certain nombre de sculptures représentées font partie de la collection Daniélou. Daniélou et Kramrisch s’appréciaient et, dans « La présence de Siva », Kramrisch fait plusieurs fois référence à Daniélou pour son livre le « Mythes et Dieux de l’Inde, le Polythéisme Hindou » à côté d’autres indianistes et savants tels que Louis Renou, Jean Filliozat ou Georges Dumézil.
Ce livre de 600 pages, écrit par une grande autorité en la matière, est une mine d’information de première main sur le culte de ce Dieu.

C’est plus de 100 pages qui sont consacrées « au linga (le phallus), au dieu androgyne, à la création de la femme, du sexe et de l’épanouissement sensuel, à la généalogie du plaisir, à la yoni. la vulve, la matrice. »
Nous y retrouvons la même philosophie que celle que Daniélou a transmis dans ses ouvrages sur le Shivaïsme. A aucun moment dans ces nombreuses pages consacrées au linga, Stella Kramrisch ne met en doute qu’il s’agit bien du phallus du dieu et associe très souvent les deux mots ce qui, dans les cultures orientales, n’est pas plus étrange que s’il s’agissait du troisième oeil frontal du dieu.
Extraits des pages 181 à 289
Page 272 : Brahma fit l’expérience du bonheur lorsque la création devint sexuelle
Page 280 : Ainsi, par la partie inférieure de son corps Siva était le destructeur, mais la brûlait aussi le feu du sexe. Il avait joué avec celui-ci dans la forêt de Deodar. Il tenait son linga nu dans sa main ; à sa vue les femmes des sages s’enflammaient.
Page 282 : Dans les temps anciens, les adorateurs du phallus étaient tenus à l’écart du sacrifice et le dieu Indra en faisait peu de cas. Il les exécutait.
Page 284 Jamais dans aucun des mythes ou formes du linga de Siva, la base phallique évidente du signe du Grand Dieu ne fut oubliée.
Page 195 : les plus anciennes sculptures catégoriquement identifiées comme Siva-linga révèlent une forme de pilier ; le sommet arrondi est bien démarqué et figure clairement le gland. Si bien que la flèche représente non seulement un pilier mais aussi un phallus.
Page 196 : tous les êtres ont un linga (phallus) ou un bagha (matrice). Toutes les créatures de ce monde doivent être considérées comme appartenant à Siva et à sa compagne.
Page 200 : La forme de pilier est assimilée à celle de linga, le phallus érigé. Shiva est présent dans le linga, le phallus. Le phallus est son symbole…
Page 193 : un linga est attaché au corps d’un nouveau-né dans la famille Virasaiva ou Lingayat et chaque Lingayat porte sa vie entière, un linga suspendu au cou dans un écrin d’argent.

ANNEXE 6 : Communiqué AFP La Valette, 12 avril 2010 – Un maire demande le retrait d’un monument phallique avant la visite du pape
Le maire d’une ville proche de l’aéroport international de Malte a demandé lundi que l’on retire un monument qui évoque la forme d’un pénis, afin de ne pas offenser le pape Benoît XVI qui effectue une visite sur l’île le week-end prochain.
Pour John Schembri, maire de Luqa, ce monument « honteux, vulgaire, obscène et embarrassant » devrait être retiré « en signe de respect pour le pape ».
Le monument, baptisé Colonne Méditerranée, est l’oeuvre d’un sculpteur et artiste en céramique, Paul Vella Critien, qui en a installé de similaires en Allemagne, en Italie et en Australie, à Melbourne et Sydney. Pour le sculpteur, cette colonne, avant-gardiste mais inspirée de l’antiquité égyptienne, « pointe vers l’éternité ».

Lettre ouverte à Monsieur Michel Labro, le Rédacteur en chef exécutif de l’hebdomadaire Le Nouvel Observateur. Quand la presse française vole bas : au sujet d’un article intitulé « Daniélou le traître » paru dans Le Nouvel Observateur.

Monsieur le Rédacteur en chef,

Acceptez que je paraphrase un de vos éminents collègues, B. Poirot-Delpech, qui donnait dans sa chronique du Monde du 12 Octobre 1981 le titre « Quand Apostrophes vole haut » au programme de Bernard Pivot qui présentait entre autres les mémoires d’Alain Daniélou « Le Chemin du Labyrinthe » (Editions du Rocher réédition en 1993) Ce journaliste citait « la formidable liberté d’Alain Daniélou évoquant la mort de son frère ».
Quand un article se permet, dans son titre, l’emploi du mot « traître », à l’égard d’un auteur mort il y a 16 ans et dont l’oeuvre s’étale sur 45 ans, a été traduite en 11 langues, distribuées dans 18 pays, un minimum de recherche et de connaissance de cette oeuvre est le moins qui peut être requis. Nous apportons ci-après des éléments qui prouvent cette absence de recherche. Ce serait plutôt à cet article que le mot « traître » conviendrait car il emploie et transmet des informations erronées, apparemment d’abord soucieux de scandale. A nous d’écrire que cet article est « vomi», « accablant, » termes que nous y relevons.

Premier problème dans le titre même : employer le nom « Daniélou » sans en donner le prénom c’est jouer de manière indécente en essayant d’associer les deux frères. Non seulement, mais citer la mort du cardinal dans un article qui est supposé traiter d’hindouisme relève d’une conception journalistique peu digne. Qu’a à voir cette mort avec le sujet traité ! Et quand en plus il est écrit qu’Alain Daniélou « éprouvait une jalousie morbide pour son frère», on reste pantois devant tant d’ignorance mensongère.
Concernant cette supposée jalousie, morbide de surcroit, envers son frère Jean, le cardinal il était pourtant si facile de se référer aux belles pages (34 à 38) de son autobiographie « Le Chemin du Labyrinthe » concernant celuici. On y lit entre autres : « Il est mort comme meurent les véritables saints dans l’ignominie, la risée, le mépris, d’une société haineuse et vile ». (Autres citations en annexe 1)
Nous pouvons apporter un élément à cette question. A la mort de son frère Alain Daniélou, qui estimait particulièrement ses ouvrages sur les premiers âges de la Chrétienté a voulu que cette oeuvre importante ne soit pas perdue et a demandé de faire des recherches pour retrouver les éditeurs de ses principaux livres. Ceci rassemblé Alain Daniélou décida de confier la gestion de ce fonds à sa nièce Michèle Monnier-Izard , qui prit grand soin de faire que cette oeuvre importante ne tombe pas dans l’oubli.

Cependant notons qu’Alain Daniélou ainsi que sa soeur Catherine Izard, se sont fermement opposés à la publication des « Carnets spirituels » dans leur version complète, considérant que ces carnets d’un jeune séminariste n’apportaient rien à l’oeuvre du cardinal. Il reçut le soutien des Jésuites ordre auquel appartenait le cardinal : le Père H. Madelin, Provincial de France de la Compagnie de Jésus lui écrivait en 1985 :: « Heureux de votre compréhension pour agir en vue dʼune saine compréhension de la mémoire du Cardinal Daniélou, je vous prie dʼagréer, Monsieur, lʼexpression de mes sentiments reconnaissants. » (Texte intégral en annexe 2)

Au sujet de Swami Karpatri l’article indique : « pour avoir falsifié de manière criminelle la pensée de Swami Karpatri, un des sages les plus lumineux de l’hindouisme du XXè siècle ». En écrivant cela il prouve qu’il ignore tout de ce personnage alors qu’un minimum de recherche aurait permis de donner des informations intéressantes. Mais il faut et savoir qu’Internet existe, et Google aussi et parler un minimum d’anglais.
L’emploi du mot « criminelle » est clairement diffamatoire et injurieux, d’autant qu’il n’est pas assorti de la moindre preuve dudit « crime » et que Daniélou a toujours exprimé sa dévotion à ce penseur tant par ses écrits que dans les nombreux interviews dans lesquels il en parle (Annexe 3 et notre lettre d’information n° 21 sur notre site donne de longs extraits de la dernière interview de Daniélou au sujet de ses rapports avec Karpatri).

Nous relevons dans ces sites (textes complets en annexe 4) : “the most controversial orthodox ascetic of post- Independence India”/one section of Brahmans, led by Swami Karpatri, constructed another Vishvanâtha temple which was to remain ‘pure’(unpolluted by untouchables)/.the R.R.P. manifesto, a « handbook for Indian reactionaries and obscurantists/the anachronistic views of Karpatri, his ingenuous fanaticism,/His rigid conservatism was perhaps most evident in his attitude toward the socially oppressed

Ceci nous ramène à une autre invraisemblance professée dans cet article à savoir d’attribuer à Daniélou la définition de l’hindouisme comme un polythéisme alors qu’il serait un monothéisme Indologues, indianistes de grande renommée sont fort nombreux bien avant Daniélou, à avoir défini l’hindouisme un polythéisme.. Quant à trouver dans ce livre austère, qui fait référence depuis sa parution en 1960, « des fantasmes sexuels », cela semble une gageure : on en attend des citations.

Le passage mentionnant que notre Fondation n’a pas apporté de rectificatif à la confusion citée ci dessus est faux. Notre lettre d’information N° 12 (2006) actuellement toujours sur notre site l’indique sans contestation (Annexe 5).

Ce qui est évident, était facile à contrôler à la page 380 du « Chemin du Labyrinthe » (édition complétée de 1993) et aurait évité une ahurissante bévue dans votre article en faisant des comparaisons avec Jean Moulin et la Milice est ce qu’écrit Alain Daniélou : « Karpatri était très hostile aux idées du RSS (Rashtriya Svayam Sevak Sangh) qui préconisait des méthodes inspirées du fascisme dans sa lutte contre le Congrès et les idées modernistes »..
Cet amalgame, anachronique et indécent, avec la Milice est inacceptable : Alain Daniélou a perdu un frère dans les FFL, il a publié dans la revue France-Orient en 1945 (Annexe 8) où paraissent aussi des textes du Général de Gaulle, et rien dans son parcours ne permet de l’assimiler à la collaboration armée au services de l’occupant nazi. Un tel parallèle est une atteinte à l’honneur d’Alain Daniélou, fait chevalier de la Légion d’Honneur par le général de Gaulle, puis officier par François Mitterand. Le titre « Daniélou, le traître » est à ce propos, plus qu’ambigu.

Le sous titre de votre article parle de « Maître » et l’article lui-même de « collaborateur ». De nouveau nous sommes en pleine contradiction avec ce que Daniélou a écrit, dit et répété à savoir qu’il ne se considérait absolument pas comme un gourou, se moquait vertement des Occidentaux en quête de « maîtres » comme de bons restaurants, était un travailleur solitaire qui n’a jamais eu de disciples et jamais autour de lui une chapelle de dévots ce qui l’aurait profondément agacé. Là aussi les citations sont nombreuses et notre lettre d’information n° 21 toujours sur notre site en fournit amplement (Annexe 6). Je relève entre autres : J’ai eu la chance d’être en contact avec une certaine forme de savoir, et j’ai cherché à l’exprimer. Mais je ne joue pas de rôle, je ne suis pas un gourou. »

Au sujet du linga (Annexe 7) les éditions du Cerf ont publié en 1981 un livre « La présence de Siva » de Stella Kramrisch, indologue réputée. Elle y écrit un long et savant passage (pages 181 à 289) qui ne laisse aucun doute sur le lien entre le linga et le phallus du dieu, la yoni et le sexe de la déesse. Nous relevons entre autres : page 284 « Jamais dans aucun des mythes ou formes du linga de Siva, la base phallique évidente du signe du Grand Dieu ne fut oubliée. (Autres références en Annexe 9).

Daniélou a écrit son premier livre concernant le Yoga en 1949 ; les derniers ont été publiés en 2006. Pendant 56 ans des personnes très éminentes, des spécialistes de l’Inde ont étudié ses textes. Il y a des centaines sinon un millier de critiques, bonnes et mauvaises, dans nos archives. Serait-il possible que tant de gens pendant tant de temps aient pu être bernés par un génial faussaire ? Nous nous joignons aux inconditionnels de Daniélou mais aussi aux personnalités, critiques impartiaux de son oeuvre, qui nous ont manifesté leur stupéfaction devant les termes outranciers de votre publication.

Je vous prie, Monsieur le Rédacteur en chef, d’accepter l’expression de mes salutations.

Pour le Centre d’Etudes Alain Daniélou, Jacques Cloarec, Fondé de pouvoir.

P.S. :Vous excuserez aussi la longueur de cette missive car nous n’avons pas voulu faire comme dans l’article cité et donnons des références et des citations suffisantes pour réfuter les mensonges et imprécisions que ce texte véhicule.

ANNEXES ANNEXE 1 : Le Chemin du Labyrinthe, Le Rocher 1981, extraits des pages 34 à 38
J’ai très peu connu mon frère aîné Jean sauf durant les quelques semaines de vacances que nous passions ensemble à Locronan …J’ai profondément admiré cette fin semblable à celle des martyrs dont le parfum monte droit vers le ciel sous l’opprobre et les quolibets de la foule. Il est mort comme meurent les véritables saints dans l’ignominie, la risée, le mépris d’une société haineuse et vile. Cela convenait mieux à sa nature que les homélies hypocrites et les catafalques de Notre-Dame…Mon frère se chargea de démontrer que le scandale ne vient pas de nos croyances ou de nos actes mais de l’ironie des dieux qui se moquent de ce fatras de règles de conduite et de soi-disant « vérité à croire » dont les humains leur attribuent la paternité.

ANNEXE 2 : Lettre manuscrite du 12 Mai 1985 du Père H. Madelin, Provincial de France de la Compagnie de Jésus, à Alain Daniélou.

Monsieur,

En réponse à votre lettre du 28 Avril concernant l’éventuelle publication des Carnets de jeunesse de votre frère, je tiens à vous dire que je partage totalement vos réserves. Il ne me semble pas utile de raviver, par une telle publication, des polémiques qui se sont bien apaisées dans la dernière période. Au surplus après avoir pris soin de les lire, je ne trouve pas qu’ils soient d’une grande utilité pour la connaissance de votre frère. Je partage donc votre avis qu’il est bon de laisser ces écrits dormir pendant plusieurs années et même d’éviter leur parution au delà de cette période.
Le regroupement des archives de votre frère sous ma responsabilité est une mesure conservatoire qui évite la dispersion et une forme de protection de sa mémoire contre des zélateurs toujours trop empressés. C’est une façon aussi de respecter la volonté prudentielle de votre soeur qu’elle avait transmise à mon prédécesseur. Les publications récentes d’oeuvres déjà connues de votre frère servent sa mémoire et manifestent l’actualité de son intelligence théologique. La publication de ces carnets ne semble pas participer de cet objectif.

Heureux de votre compréhension pour agir en vue d’une saine compréhension de la mémoire du Cardinal Daniélou, je vous prie d’agréer, Monsieur, l’expression de mes sentiments reconnaissants.

ANNEXE 3
Une regrettable confusion entre deux partis de la droite indienne qui prend quelques lignes dans « l’Histoire de l’Inde » (Fayard 1985), est le prétexte à un procès d’intention : Alain Daniélou est accusé d’avoir voulu salir celui pour qui il a toujours exprimé admiration et reconnaissance. Nous nous inscrivons totalement en faux contre cette assertion concernant Karpatri. Sachant de l’activité politique de Karpatri Daniélou insiste sur le fait que ses rapports avec lui excluaient cet aspect politique et ne concernaient que les aspects philosophiques et religieux de l’hindouisme qui lui ont permis d’écrire un de ses livres les plus connus, traduit en plusieurs langues ; « Mythes et Dieux de l’Inde, le Polythéisme Hindou » dont la première version est parue à l’Université de Princeton.

Si Karpatri est considéré comme un saint en particulier pour beaucoup de gens de Bénarès, il a été violemment attaqué pour ses positions orthodoxes extrêmement intransigeantes et ses oppositions aux lois du gouvernement indien dominé par Nehru et le parti du Congrès qui finirent par l’emprisonner. Ceci concernait en particulier son opposition farouche à l’entrée des intouchables dans les temples hindous.

On trouvera dans notre dernière lettre d’information (N° 21) sur le site www.alaindanielou.org des textes de Daniélou qui clarifient ses rapports avec Karpatri. Les buts de notre centre sont de publier tout ce que Daniélou a pu écrire afin que des critiques compétents et honnêtes puissent juger de sa pensée et de son oeuvre. Ainsi nous ne porterons aucun jugement sur Karpatri car ce n’est absolument pas notre rôle.

ANNEXE 4 relevé sur Internet : voir le même texte annexe n°3 sur la lettre au Point

ANNEXE 5 : Alain Daniélou Actualités Newsletter/ Lettre d’informations n°12 Winter /Hiver 2006.
https://www.alaindanielou.org actuellement toujours sur notre site indique :

A propos des écrits d’Alain Daniélou celui-ci a confondu dans deux de ses textes deux mouvements politiques différents.

En effet dans « L’Histoire de l’Inde » publiée en 1971 par Fayard et dans l’autobiographie « le Chemin du Labyrinthe » publiée en 1981, deux livres régulièrement réimprimés et traduits depuis, il attribue au moine indien Swami Hariharanand Sarasvati, plus connu sous le nom de Karpatri, la fondation d’un mouvement politique le Jana Sangh alors qu’il avait fondé un mouvement appelé Ram Rajya Parishad, d’idéologie différente. Bien que les textes en question soient publiés depuis près d’un quart de siècle ce n’est que ces dernières années que cette confusion a été relevée et trouble certains milieux indiens qui en ont eu connaissance par l’édition anglaise récente du premier livre à savoir « A Brief History of India » (Inner Traditions International, Rochester, USA, 2003). Dès ceci découvert j’ai, bien entendu, demandé aux éditeurs concernés d’insérer un erratum dans les ouvrages en question ce qu’ils m’ont indiqué prévoir de faire dans les prochaines réimpressions. Cette correction sera aussi insérée dans la traduction espagnole à paraître dans quelques mois à Barcelone (Kairos Edition).

ANNEXE 6 : Lettre d’information n° 21 sur notre site Internet www.alaindanielou.org
« Karpatri a bien voulu répondre à nombre de mes questions. Mais je ne cherchais pas un gourou et il ne cherchait pas des disciples. Cette idée de chercher un gourou est tout à fait une maladie des Occidentaux. Tous ces gens qui veulent avoir un maître et devenir eux-mêmes des gourous ! Je ne cherchais pas à avoir un rôle ! J’ai eu la chance d’être en contact avec une certaine forme de savoir, et j’ai cherché à l’exprimer. Mais je ne joue pas de rôle, je ne suis pas un gourou. »

ANNEXE 7 :
Le mot « Linga « en sanskrit signifie « signe. » Alain Daniélou écrivait le 27 Février 1988 au Dott. Gino Del Piero Udine Italie : « …le mot Linga signifie « signe ». C’est par un signe, un linga, que Shiva a marqué les lieux sacrés favorables à la réalisation spirituelle. Ces emblèmes ne sont pas toujours de formes phalliques mais des objets informes tel que le linga de Vishvanath à Bénarès, qui ressemble à un plat de lentilles. » Cependant – comme le fait très fréquemment Daniélou – il est, dans sa représentation courante, assimilé au sexe du dieu Shiva et son socle au sexe de la déesse.

L’interprétation ne date pas d’hier et est connue en Occident depuis fort longtemps. Nicolo Manucci, voyageur italien qui séjourna à la cour des Moghols écrivait déjà dans son livre « La storia do Moghol » en 1698, que « Quest’idolo che è di pietra e si chiama lingon» était la représentation du sexe du dieu. Le grand indianiste Jean Filliozat, qui fut directeur de l’Institut français d’Indologie de Pondichéry écrivait à propos de voir dans le linga le phallus de Shiva : « C’est le point de vue de la plupart des Shivaïtes en Inde contrairement à ce que l’on pense en Occident ».

ANNEXE 8 :

France-Orient - Revue de culture Française

ANNEXE 9 : La Présence de Siva par Stella Kramrisch, éditions du Cerf 1981
Stella Kramrisch, grand nom de l’indologie internationale est célèbre pour son ouvrage « The Hindu Temple, 1946, dernière réédition 2002» livre auquel Alain Daniélou et son compagnon, le photographe Raymond Burnier ont beaucoup contribué en particulier pour l’iconographie. Un certain nombre de sculptures représentées font partie de la collection Daniélou. Daniélou et Kramrisch s’appréciaient et, dans « La présence de Siva », Kramrisch fait plusieurs fois référence à Daniélou pour son livre le « Mythes et Dieux de l’Inde, le Polythéisme Hindou » à côté d’autres indianistes et savants tels que Louis Renou, Jean Filliozat ou Georges Dumézil.
Ce livre de 600 pages , écrit par une grande autorité en la matière, est une mine d’information de première main sur le culte de ce Dieu. C’est plus de 100 pages qui sont consacrées « au linga (le phallus), au dieu androgyne, à la création de la femme, du sexe et de l’épanouissement sensuel, à la généalogie du plaisir, à la yoni. la vulve, la matrice. »
Nous y retrouvons la même philosophie que celle que Daniélou a transmis dans ses ouvrages sur le Shivaïsme. A aucun moment dans ces nombreuses pages consacrées au linga, Stella Kramrisch ne met en doute qu’il s’agit bien du phallus du dieu et associe très souvent les deux mots ce qui, dans les cultures orientales, n’est pas plus étrange que s’il s’agissait du troisième oeil frontal du dieu. Mais apparemment en 2010 l’Occident devient pudibond (Annexe 10)

extraits des pages 181 à 289
Page 272 : Brahma fit l’expérience du bonheur lorsque la création devint sexuelle
Page 280 : Ainsi, par la partie inférieure de son corps Siva était le destructeur, mais la brûlait aussi le feu du sexe . Il avait joué avec celui-ci dans la forêt de Deodar. Il tenait son linga nu dans sa main ; à sa vue les femmes des sages s’enflammaient.
Page 281 La version mythique de l’entrée du linga dans la yoni racontée dans le Siva Purana réduisit la dimension cosmique du linga à sa fonction de pénis.
Page 282 : Dans les temps anciens, les adorateurs du phallus étaient tenus à l’écart du sacrifice et le dieu Indra en faisait peu de cas . Il les exécutait.
Page 284 Jamais dans aucun des mythes ou formes du linga de Siva, la base phallique évidente du signe du Grand Dieu ne fut oubliée.
Page 195 : les plus anciennes sculptures catégoriquement identifiées comme Siva-linga révèlent une forme de pilier ; le sommet arrondi est bien démarqué et figure clairement le gland. Si bien que la flèche représente non seulement un pilier mais aussi un phallus.
Page 196 : tous les êtres ont un linga (phallus) ou un bagha (matrice). Toutes les créatures de ce monde doivent être considérées comme appartenant à Siva et à sa compagne.
Page 200 : La forme de pilier est assimilée à celle de linga, le phallus érigé.. Shiva est présent dans le linga, le phallus. Le phallus est son symbole…

Page 193 : un linga est attaché au corps d’un nouveau-né dans la famille Virasaiva ou Lingayat et chaque Lingayat porte sa vie entière, un linga suspendu au cou dans un écrin d’argent.

ANNEXE 10 : La Valette, 12 avril 2010 (AFP) – Un maire demande le retrait d’un monument phallique avant la visite du pape
Le maire d’une ville proche de l’aéroport international de Malte a demandé lundi que l’on retire un monument qui évoque la forme d’un pénis, afin de ne pas offenser le pape Benoît XVI qui effectue une visite sur l’île le week-end prochain.
Pour John Schembri, maire de Luqa, ce monument « honteux, vulgaire, obscène et embarrassant » devrait être retiré « en signe de respect pour le pape ».
Le monument, baptisé Colonne Méditerranée, est l’oeuvre d’un sculpteur et artiste en céramique, Paul Vella Critien, qui en a installé de similaires en Allemagne, en Italie et en Australie, à Melbourne et Sydney. Pour le sculpteur, cette colonne, avant-gardiste mais inspirée de l’antiquité égyptienne, « pointe vers l’éternité ».